Murat-sur-Vèbre

Des vestiges Renaissance

Des travaux de sauvegarde récompensés

Démarrés en 2008, les travaux seront récompensés par le prix décerné par la Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de la France. Le prix sera remis à la Communauté des Monts de Lacaune, la mairie de Murat-sur-Vèbre et l'association "Sauvegarde du patrimoine de Canac" alors d'une cérémonie au Palais du Luxembourg.
      

Restitution de la construction

A partir du rapport de fouille et de diverses observations, voici une tentative de restitution graphique de l’aspect extérieur et intérieur du château, ou plus exactement, de la maison forte de Canac

Le chemin qui donnait accès à la maison-forte  devait serpenter à flanc de colline depuis le village de Canac ; il se termine par une terrasse qui s’élargit légèrement au niveau de la porte. L’appareillage des pierres qui donnent le mur de soutènement de cette terrasse est bien médiocre en regard des murs du château, et l’ensemble est réalisé en applique contre la façade, c’est-à-dire dans une phase ultérieure à la construction du bâtiment.
La façade s’élevait probablement sur 16 m depuis le seuil de la porte jusqu’à l’égout de la toiture, et la tour d’angle est estimée 1 étage plus haute (ill.2).

La porte était surmontée des armes du seigneur, comme l’indiquent les traces d’arrachement visibles aujourd’hui. A gauche de cette porte, une ouverture de forme horizontale dont les pierres d’encadrement ont été spoliées (comme pour la totalité des ouvertures en façade), semble destinée à défendre l’accès. Des arquebusières trouveraient là un emplacement logique.
Au-dessus, la façade sud-est semble avoir été percée sur trois niveaux, de neuf fenêtres de taille décroissant avec la hauteur. Cet ordonnancement à première vue symétrique souffre toutefois de quelques écarts. 

1. Les Armes de Jean de GÉNIBROUSE, seigneur de Canac, Nages et Tiberet (1669).

Malgré l’arrachement des encadrements, quelques fragments trouvés sur le site renseignent sur la conception -très classique- de ces fenêtres : il s’agissait de fenêtres à croisée majoritairement en grès rose, pierre trouvée en abondance dans la proche région dite « Rougier de Camarès ». Cette pierre se retrouve en réemploi dans les maisons du village de Canac . Si l’on excepte ce type de pierre, tous les murs comme  les lauzes du toit sont en schiste, matériau extrait sur le terrain lui-même comme en témoigne le front de taille présent à 3 m de la façade nord-ouest.

2. Elévation en perspective de la maison forte de Canac (façades sud-est et nord-est)

La partie droite du dessin représente la façade nord-est flanquée d’une tour d’angle tournée vers la vallée du Dourdou et l’ancienne province de Guyenne. Cette façade semble bien moins richement dotée en ouvertures que la façade sud-est : Les vestiges n’indiquent qu’une seule grande fenêtre, probablement aussi à croisée, compte tenu de sa taille. Les niveaux inférieurs comportent quelques petites ouvertures dont le barreaudage semblerait la protection la plus simple.
La tour devait surplomber le corps de logis d’un niveau. L’escalier intérieur remplissait tout l’espace disponible. Dans l’épaisseur du mur, une latrine est encore présente.

            Par analogie avec les châteaux et maisons fortes des environs, la toiture était probablement à quatre pentes, tant pour la tour que pour le corps de logis.  La couverture était en lauzes (et non en ardoises) et le débord de toiture pouvait s’appuyer sur des corbeaux de pierre tels ceux retrouvés en réemploi dans le village de Canac .  

L'intérieur

L’analyse des vestiges indique que sur une surface au sol de 308m2, la maison-forte comprenait plusieurs espaces distincts :

3. Plan de base de la maison forte 

Depuis la porte d’entrée (1), et  avant de gravir la première volée de l’escalier, une porte donnait accès à une salle voutée partiellement enterrée et creusée dans le rocher (corps de logis 3) dont le seul éclairage provenait d’un soupirail en hauteur. Des coups de sabre tendent à indiquer que c’est ce corps de logis qui a été construit en premier. L’accès au niveau supérieur était possible grâce à une ouverture dans la voûte par laquelle passait une échelle ou un escalier de bois. 

4. Salle voutée avec l'entrée primitive de la maison forte. La flêche indique le passage (refermé) de l'échelle vers le niveau supérieur.

Le niveau du sol de cette pièce est plus bas que le reste, ce qui se répercute sur les niveaux supérieurs. Quand le reste du bâtiment a été construit à 1,5 ou 2m plus en hauteur, le rôle de l’escalier a été de rétablir l’uniformisation des niveaux. Par une savante inclinaison des différentes volées de marches, la différence entre les seconds niveaux s’amenuise pour disparaitre complètement aux troisièmes et quatrièmes niveaux.

L'escalier à volées inversées

La restitution intérieure selon un plan de coupe sud-ouest explique clairement  la fonctionnalité de l’escalier à volées inversées:

Les paliers en haut de chacune des volées desservent de plain-pied des pièces qui ne sont pas à la même altitude. Les quatre premières volées reposent sur une voute en pierre, la cinquième qui relie les niveaux 3 et 4 serait en bois.

5. Restitution intérieure de la maison forte selon un plan de coupe sud-ouest


Cet escalier était éclairé par des grandes fenêtres, qui pouvaient être occultées par des volets intérieurs.
6. Exemple d’escalier à volées inversées daté de 1608(Château de Sainte-Suzanne ; Mayenne)

La fermeture des volets de la première fenêtre était renforcée par plusieurs verrous, de la même façon que la porte d’entrée qui se trouvait immédiatement en dessous.

7. Empreinte des verrous de fenêtre d'escalier












 

L'aménagement intérieur

Les pièces au-dessus de la salle voutée (corps de logis 3), sont éclairées par les grandes fenêtres à croisée, exposées sud-est, donnant une vue plongeante sur le village et la vallée. Cette situation d’exception, ajoutée à des éléments indiquant que les murs s’ornaient d’un parement de bois, que le plancher était recouvert de tomettes, tend à attribuer à ces pièces une fonction de réception ou du moins de pièces nobles.








8. Vue du village de Canac depuis le château
9. Exemple d’intérieur de la fin du XVIe siècle, avec             boiseries murales.


Toutefois c’est l’examen des murs sud-ouest et nord-ouest qui donnent le plus d’informations sur l’aménagement intérieur de la maison-forte. Une restitution intérieure selon un plan de coupe nord-ouest en faisant angle avec la restitution présentée plus haut (plan de coupe sud-ouest) explique pleinement cette organisation :
 Le premier niveau en rez-de-chaussée, éclairé par des soupiraux, s’apparente à un espace de stockage. Un arc sépare les espaces 4 et 5,  dont le sol n’est pas au même niveau. La seule fonction que l’on puisse attribuer à cet arc est de supporter une cloison aux étages supérieurs.
Ainsi, au second niveau on distingue dans l’espace 5 une pièce comportant une cheminée placée entre 2 petites fenêtres (ill.10). En gravissant quelques marches on accède à une autre pièce (dans l’espace 4) plus basse de plafond. Plusieurs niches sont pratiquées dans le mur (ill.10) et une cheminée de grande taille trône au fond (ill.5 et ill.11). Enfin, à côté de cette cheminée, une ouverture présentait un encadrement en grès rose sur sa face intérieure, ce qui est l’unique cas relevé sur tout  le bâtiment. 

10. Restitution intérieure selon un plan de coupe nord-est

En considérant l’ensemble de ces éléments, cette pièce rappelle les cuisines que l’on trouve dans les châteaux environnants. Les niches, nombreuses comme dans la cuisine du château d’Escroux, permettent le rangement de la vaisselle et des ustensiles.  La cheminée est spacieuse pour y rôtir les grandes pièces de viande (ill.12) et parfois un four à pain est aménagé dans l’épaisseur latérale (ill.13).
Quant à l’ouverture tout à côté de la cheminée, la restitution proposée (ill.5) montre une fenêtre ouvragée, étant donné que les blocs de grès rose sont utilisés en raison de leur facilité de taille. Mais dans l’hypothèse où cette pièce est une cuisine, il serait plus logique d’imaginer par exemple un évier en dessous d’une petite fenêtre, cet évier se vidant à travers le mur, vers l’extérieur…

Le quatrième niveau est le dernier étage dont on peut attester avec certitude la présence. Accessible par un escalier en bois d’une seule volée (ill.5), et doté de fenêtres rares et petites (ill.10), il ne semble pas correspondre aux attentes d’une famille noble, mais plutôt au logement des domestiques ou même à un grenier.

Cette description serait complète si l’on pouvait situer d’autres éléments indispensables aux XVIe - XVIIe siècles, pour la vie dans une maison-forte retranchée au sommet d’une colline : écuries, citerne, …

                                                                     Mais le château de Canac n’a pas livré tous ses secrets...

Illustrations


11. Vue intérieure des murs sud-ouest et nord-ouest (avant consolidation), montrant l'emplacement de la cheminée et les niches d'une cuisine probable

12. Four à pain dans la cheminée de la cuisine du château d'Escroux (Tarn)

            13. Cheminée de la cuisine du château de Latour-sur-Sorgues (Aveyron)
















                                           
   








14 : Bloc de grès rose découvert sur le  site (base de pieddroit d'une cheminée)
                                                        15 : Cheminée du XVIème siècle, du château d'Escroux (Tarn)

Sauvegarde du patrimoine de Canac

L'association de type loi 1901 a pour objet d'accompagner le projet  de conservation des vestiges du château de Canac et leur présentation au public.
  Sauvegarde du patrimoine de Canac
         Chez Mr Metgé Canac
          81320 Murat-sur-Vèbre
                       
Une Lettre d'Information annuelle a  présenté les travaux de sauvegarde et les études historiques et archéologiques.

La Lettre d'Information 2019
La Lettre d'Information 2017
La Lettre d'Information 2016
La Lettre d'Information 2015     
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La Lettre d'Information 2012 
La Lettre d'Information 2011     
a Lettre d'Information 2010
La Lettre d'Information 2009   
La Lettre d'Information 2008
La lettre d'Information juillet 2008                 
La Lettre d'Information 2007

 

Etude archéologique


Une  opération de fouille programmée du site des vestiges, sous la direction du Service Régional de l’Archéologie (DRAC Midi-Pyrénées), a été réalisée par Magali Cabarrou en collaboration avec Magali Baudoin.

    

     Le rapport définitif présente l’ensemble des relevés effectués et propose l’organisation la plus probable de l’édifice. L’hypothèse d’une construction dans une seule séquence historique dans la deuxième moitié du XVIème sans aménagements significatifs ultérieurs est confirmée.  Le rapport souligne l’importance des informations recueillies sur une rare construction de la Renaissance dans le Tarn.



Le document est consultable à la bibliothèque municipale de Murat-sur-Vèbre : Rapport de fouille programmée n° 103/2010-2012 : La maison forte de Canac, 2013.